Le pardon, un art de la flottaison
Le pardon, un art de la flottaison
Ta souffrance, ressac froid et profond,
T'engloutit, te glace, ton âme se voile.
Lutter est vain, tes forces s'épuisent,
Ton être se brise, emporté par la houle.
Mais rends-toi, respire, cesse le combat,
Laisse-la te porter, bercer tes tourments.
Son flux devient apprentissage intime,
Tes yeux s'ouvrent à une autre perspective.
Ce n'est pas l'onde qui t'engloutit vraiment,
Mais ta résistance, ton refus obstiné.
Lâche prise, accueille ce courant amer,
La mer t'embrasse, te lave, t'éclaire.
Dans cet accueil, le pardon s'épanouit enfin,
Un rivage de sable doux, la tempête s'éteint.
Douleur, tempête, raz-de-marée soudain,
Vent glacial qui mord le cœur, le désempare.
Tu voudrais fuir, t'échapper, te défaire des liens,
Mais chaque spasme te précipite plus avant.
Plus tu te débats, plus tu sombres, impuissant.
Non, ce n'est pas la mer qui te noie vraiment,
Mais la peur panique de toucher le fond.
Alors, écoute, allonge-toi sur les flots amers,
Laisse la peine te traverser, comme les marées claires.
Elle ne te détruit pas, elle t'enseigne en secret,
Mémoire vive, trace salée du passé.
Intègre-la, comme la mer boit la pluie d'été,
Sans heurt, sans colère, juste l'humide clarté.
Pardonner n'est pas oublier le naufrage amer,
Mais apprendre à naviguer sur ses planches brisées.
Faire de la blessure un cap, une étoile polaire,
Du silence lourd, un chant d'espoir apaisé.
Sans résistance, le courant t'emporte et te guide,
Ami de l'eau, ami de ton être enfin trouvé.
Le rivage du cœur se révèle, limpide,
Vaste, entier, apaisé, enfin délivré.
Riad Zein
